Actu : L’empereur Akihito du Japon va pouvoir abdiquer comme il le souhaitait

L’empereur Akihito du Japon va pouvoir abdiquer comme il le souhaitait

L’empereur Akihito du Japon a obtenu gain de cause. Le Parlement japonais a voté ce vendredi une loi lui permettant d’abdiquer pour son fils aîné le prince Naruhito.

Au mois d’août 2016, l’empereur du Japon avait créé la surprise. Dans une très rare allocution télévisée, Akihito avait laissé filtrer ses craintes quant à ses aptitudes à accomplir les multiples tâches liées à son rang de «symbole de la nation et de l’unité du peuple», du fait de son âge, 82 ans à l’époque. Mais même s’il le souhaitait, le souverain nippon, qui a depuis fêté ses 83 ans le 23 décembre dernier, ne pouvait abdiquer, la Constitution l’en empêchait.

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Ce n’est désormais plus le cas. Le Parlement japonais a en effet voté ce vendredi 9 juin 2017 une loi lui permettant de céder le trône à son fils aîné, ouvrant ainsi la voie à la première abdication en plus de 200 ans. Cette loi, soumise par le gouvernement du Premier ministre conservateur Shinzo Abe, ne s’applique qu’à lui seul et Akihito doit céder la place au prince héritier Naruhito, à une date qui sera fixée par décret, dans les trois ans suivant son entrée en vigueur. Si tout se passe comme prévu, l’empereur pourrait, selon la presse japonaise, renoncer à ses fonctions dès la fin de l’année 2018 et laisser au prince héritier le trône du Chrysanthème début 2019, après trois décennies d’un règne baptisé Heisei ou «parachèvement de la paix». La succession, qui aura lieu immédiatement après l’abdication, marquera le début d’une nouvelle ère dont le nom est décidé au terme d’une longue investigation.

Une loi d’exception pour aller plus vite

Aucun mécanisme n’était prévu pour autoriser l’abdication de l’empereur. Aussi, suivant les recommandations d’une commission ad hoc créée par Shinzo Abe, le gouvernement a-t-il décidé de proposer une loi d’exception. L’opposition de gauche et des universitaires avaient émis la crainte qu’une large réforme de la loi sur la Maison impériale ne prenne trop de temps, craignant en outre qu’elle ne soit utilisée aux dépens des futurs souverains via des pressions politiques pour abdiquer.

L’empereur Akihito du Japon au Parlement à Tokyo, le 13 septembre 2011 © REUTERS/Yuriko Nakao

«Cette abdication créera un précédent mais pour quelles raisons autorisera-t-on à l’avenir qu’un empereur quitte ses fonctions prématurément, cela reste flou. En ce sens, je pense que le débat sur les conditions d’application d’une telle loi a été notablement insuffisant», a déclaré à l’AFP le constitutionnaliste Sota Kimura.

Akihito jouit d’un immense respect de la part des Japonais

Né le 23 décembre 1933, en pleine conquête militariste de l’Asie par le Japon, Akihito était enfant quand son père Hirohito fut déchu de son statut divin à la suite de la capitulation nippone intervenue en août 1945. Il est ainsi le premier empereur à avoir été intronisé sous la Constitution de 1947, imposée par les Etats-Unis après la défaite et qui précise qu’il est «le symbole de l’Etat et de l’unité du peuple dont la position découle de la volonté populaire, détentrice du pouvoir souverain».

L’empereur Akihito lors des cérémonies de son accession au trône, le 12 novembre 1990 © Kyodo/via REUTERS

Ce frêle octogénaire à la voix douce, héritier de la plus ancienne famille régnante du monde -dont les racines remontent à plus de 2.600 ans selon la mythologie, au VIIe siècle après J.C. selon les historiens-, s’est efforcé de se rapprocher des citoyens japonais, auprès de la majorité desquels il jouit d’un immense respect. «Akihito a montré la silhouette d’un empereur du Japon actuel, sous la Constitution actuelle et les résultats de cette posture nouvelle se voient dans sa popularité et le respect que les citoyens lui vouent», souligne le spécialiste de la famille impériale, Shinji Yamashita.

L’empereur Akihito du Japon a modernisé sa fonction et distillé un message de paix

Bien que d’un naturel discret et contraint par ailleurs par la Constitution, Akihito a su pousser les limites lorsqu’il était prince héritier puis à sa place d’empereur. Il a rencontré, sur un court de tennis, Michiko, une roturière, et leur mariage en 1959 avait fait sensation dans tout le pays. Il a également laissé entrevoir ses opinions de manière subtile.

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Le 16 mars 2011, cinq jours après le séisme et le tsunami qui ont dévasté le nord-est du Japon, faisant plus de 18 500 morts et disparus et des centaines de milliers de sinistrés, Akihito s’était adressé directement à son peuple via la télévision, une «première». Il s’était ultérieurement rendu sur place et tous les Japonais ont en tête des images, impensables du temps des précédents souverains, d’un empereur Akihito et d’une impératrice Michiko à genoux devant les sinistrés dans des refuges, et discutant avec eux avec empathie.

L’empereur Akihito et l’impératrice Michiko avec des sinistrés du tsunami à Tokyo, le 30 mars 2011 © REUTERS/Issei Kato

125e empereur du Japon, Akihito a modernisé par petites touches la fonction, tout en distillant un message de paix, rejetant le nationalisme de la Seconde guerre mondiale et se rendant, en compagnie de son épouse Michiko, sur les lieux des exactions de l’armée japonaise, de la Chine aux Philippines en passant par les îles de Saïpan et Palaos. En août 2015, il avait exprimé de «profonds remords» pour la Seconde guerre mondiale, à l’occasion du 70e anniversaire de la fin du conflit.

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