Actu : Biarritz : atteinte d’un cancer et condamnée, elle se marie et réalise son “rêve”

Biarritz : atteinte d’un cancer et condamnée, elle se marie et réalise son “rêve”

A l’hôpital, le médecin des soins palliatifs leur a expliqué “comment allait se passer la fin”. “On s’est regardé droit dans les yeux et on s’est dit ‘plus de tabou’”, confie Aurélien Stratmains. Tout serait dit. Le doux et le cru. Le temps compté serait triste et beau. Alors voilà, Sophie et Aurélien s’aiment mais elle souffre d’un cancer du sein “triple négatif” (1). Une belle saloperie, un de ces chiens du hasard qui mordent à l’aveugle. L’oncologue parle de semaines, peut-être de jours. Mais vendredi, Sophie et Aurélien se sont mariés, à Biarritz. Et c’est pour la vie.

Jeudi, Aurélien sort d’une boutique de prêt à porter. “On a fait les retouches à mon costume”. Le cuistot à la ville file vers Métro, pour le banquet du lendemain. Le futur époux prend quelques minutes pour raconter le matin qui a lancé le sprint des préparatifs, voilà deux semaines. “Je me suis réveillé et j’ai appris que j’allais me marier très rapidement”, sourit-il. Sophie sait ce qu’elle veut. “On avait plein de rêves. Un mariage. Avoir des enfants. Voyager. Il y en a un qu’on peut réaliser”.

“Une évidence”

Techniquement, elle a pris l’initiative. “Mais je lui ai fait depuis ma demande en bonne et due forme”. À l’ancienne, avec la bague des rêves de gamines. Elle l’a acceptée ! “Ce mariage, c’est une évidence. Tout est évidence entre nous”. Depuis le premier jour de leur relation, il y a… neuf mois. Elle a 29 ans, lui 38. “On a huit ans et demi d’écart. Ne vous trompez pas ! Quand j’ai le malheur d’arrondir à dix, elle m’engueule”. Une rencontre d’aujourd’hui, par l’entremise d’un site de rencontre. “Un sérieux”, s’empresse de préciser Aurélien.

Sud Ouest

Crédit photo : Chopin Jean Daniel

Premier rendez-vous à la Chambre d’Amour. Sophie était déjà malade. À l’époque en rémission. Lui sait toute l’histoire, elle n’a rien éludé. “Lors de notre rencontre, elle avait mis une perruque. Elle ne ressemblait pas aux photos. Je la connaissais sans ses cheveux”. Ce jour-là, sur le parking, “ça a été instantané”.

L’histoire s’est accélérée. Un amour à perdre haleine. En urgence. Jusqu’à Monsieur le maire, hier, à Urcuit. Serment et serrements. Et puis l’église Sainte-Eugénie, à Biarritz. “Elle est trop belle, devant la mer”, loue Virginie, la sœur de la mariée. “Elle voulait un mariage de rêve”, appuie Delphine la “meilleure amie”. Les deux ont pris en main l’organisation de la noce. Les amis, la famille ne dorment plus depuis des jours. Tout doit être parfait.

Effleurements

La veille, salle Napoléon, à Bayonne, ce sont les grandes manœuvres. “On a la pression”. Virginie consume “le stress” en cigarettes. “Je culpabilise de ne pas passer plus de temps avec ma sœur”, soupire-t-elle. C’est douloureux. Tiffany, une autre fidèle copine, enlace Virginie. “Parfois, au milieu de tout ça, on craque”, glisse Delphine. Mais l’action tient en respect le chagrin. “C’est sûr qu’on est à fond, ça nous occupe l’esprit. Il y a l’appréhension de l’après…”

Aurélien connaît ce sentiment. “On tient à l’euphorie. On sait que ça va retomber après le mariage. Ce sera le retour à la routine de la maladie”. La chronique du corps en lutte. L’ordinaire qui s’étiole. “Sophie, elle fait tout par le mental. Elle est incroyable. J’ai peur de ce qui va se passer après le mariage. Que la maladie prenne le dessus”.

Ces deux dernières semaines, sa femme vit avec d’importantes doses de morphine. Rien ne sera tu, ont conclu les mariés et Aurélien parle de la mort avec une infinie douceur. Il évoque ce baiser, “un jour où sa température était très basse”. “Elle avait les lèvres tellement froides. Alors forcément, oui, c’est là, ça nous accompagne”. Le matin, il veille son sommeil. “Elle dort profondément à cause de la morphine. J’ai peur, alors je la touche délicatement pour sentir si sa peau est chaude”. Ce matin, c’est Madame Stratmains qu’il effleurera.

(1) Type de cancer du sein particulièrement complexe à soigner, qui représente 15 % des cas.

“Une manière de dire merci”

C’est Delphine, l’amie intime, qui s’est présentée à nous. Elle voulait parler d’un “mariage extraordinaire”. Celui de Sophie, condamnée par un cancer, qui va épouser Aurélien, son amour. “Peut-être que ça peut vous intéresser”. Une suggestion à l’initiative de Delphine, avec l’accord des futurs époux. “Dans l’esprit de tout le monde, c’est une façon de rendre hommage aux personnes qui se sont données à fond pour organiser ce mariage en un temps record”, indique la copine.

“On aurait tendance à vivre les choses de manière plus intimes, mais c’est un moyen de dire merci”, confirme le marié. Car leur histoire a soulevé un vent puissant de solidarité. Sophie narre son quotidien sur la page Facebook “Mon cancer, ma bataille”. Une lectrice a lancé une cagnotte sur le Net, quand la jeune femme a annoncé son mariage. Une dame de Montpellier, inconnue jusqu’alors, mais invitée à la noce. Il y a tant d’exemples d’actions altruistes, modestes ou grandes, pour offrir le plus beau mariage à Sophie et Aurélien. Le couple a ému.

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